En février dernier, à l’occasion de la Semaine de la Pêche et de l’Aquaculture Responsables, l’équipe pêche du MSC France s’est envolée à La Réunion pour rencontrer les pêcheries certifiées et les acteurs clés du secteur de la pêche. C’est la première fois que le MSC France se déplace sur l’île.
Il nous semblait important de venir à La Réunion puisque sur les 13 pêcheries françaises qui ont obtenu la certification MSC, 3 sont situées sur ce territoire :
La Pêcherie de légine de Kerguelen et de Crozet dans les Terres Australes et Antarctiques Françaises (TAAF), la plus ancienne pêcherie certifiée à la Réunion, qui compte 7 navires réunis au sein d’un syndicat commun : le Syndicat des Armements Réunionnais Palangriers Congélateurs (SARPC).
La pêcherie de langouste dans les TAAF, dont la certification MSC portée par la SAPMER a été obtenue en 2020.
La pêcherie d’espadon de l’ARIPA certifiée l'été dernier - qui approvisionne essentiellement le marché réunionnais.
Pendant une semaine, nous avons échangé avec les nombreux acteurs qui agissent - chacun à leur niveau - en faveur d'une pêche plus durable : pêcheries, scientifiques et administrations.
Moments de partage avec les pêcheries réunionnaises
Remise du certificat MSC à la pêcherie certifiée d’espadon
Nous commençons notre périple par une célébration ! En effet, dès notre arrivée, nous filons vers Le Port pour remettre en main propre le certificat MSC à l'ARIPA, l’Association Réunionnaise Interprofessionnelle de La Pêche et de l'Aquaculture. La pêcherie d'espadon, qui a obtenu la certification MSC en août 2022, est la toute dernière pêcherie réunionnaise certifiée. L'occasion bien sûr de les féliciter pour leur engagement, mais aussi d’évoquer les prochaines échéances (audit de surveillance, mise en œuvre du plan d’action) et l’opportunité d'étendre la certification MSC à d’autres espèces.
Nous discutons également de notre certification "Chaîne de garantie d’origine" (en lien avec la traçabilité des produits) qui permettrait aux consommateurs Réunionnais d’identifier facilement sur les étals les produits issus de la pêche durable grâce au logo MSC. Nous rencontrons également l’OP2C, qui partage les locaux de l’ARIPA, et travaille à la création d’une organisation de producteurs rassemblant les palangriers côtiers. Enfin, nous profitons de notre venue pour visiter les navires : les mini-longliners (de moins de 12 mètres) ainsi que les palangriers hauturiers.
Palangrier hauturier de l’ARIPA - D’une taille supérieure à 12 mètres, ce navire opère au-delà des 20 milles nautiques dans les eaux mauriciennes, malgaches, des Terres Australes et Antarctiques Françaises (TAAF) et en haute mer | Mini-longliners de l’ARIPA - D’une taille inférieure à 12 mètres, ils pêchent principalement dans la Zone Economique Exclusive (ZEE) réunionnaise Remise du certificat MSC à la pêcherie d'espadon de l’ARIPA |
Présentation des évolutions du Référentiel Pêcheries MSC
Ce périple est aussi l'occasion pour nous de présenter les évolutions de notre cahier des charges (appelé Référentiel Pêcheries). Nous rencontrons ainsi les membres du Syndicat des Armements Réunionnais des Palangriers Congélateurs (SARPC) pour évoquer avec eux les principaux changements dans la nouvelle version du Référentiel Pêcheries du MSC, qui s’appliquera à partir de mai 2023 aux nouveaux entrants et en 2028 à toutes les pêcheries du programme. Nous leur présentons les principales modifications notamment sur la considération des espèces protégées, la pêche fantôme ou bien encore pour le “shark fining” (découpe d’ailerons de requins). Un moment d’échange précieux pour appréhender les challenges à venir !
Nous avons la chance par ailleurs de pouvoir monter à bord de l’Albius, un palangrier de la SAPMER qui rentrait tout juste de sa campagne de légine dans les terres australes. Près de 80 jours de mer à plus de 3 400 km de l’île de la Réunion ! Le capitaine du navire nous fait tout visiter : de son poste de commandement, jusqu’à la salle des machines ! Rien n’est laissé au hasard, puisque chaque marée de pêche est suivie par un contrôleur , qui vérifie que la pêche se déroule selon la règlementation en vigueur, et que les espèces sensibles sont relâchées correctement. Ces marées n’étant pas sans danger, le capitaine nous présente aussi les règles de vie à bord pour assurer la sécurité des marins.
L’Albius, un palangrier de la SAPMER
A la rencontre des lycéens pour la Semaine de la Pêche et de l'Aquaculture Responsables avec la SAPMER
Comme chaque année depuis 7 ans, nous co-organisons avec l'ASC (ONG qui agit en faveur d'une aquaculture responsable) une semaine de sensibilisation grand public en février intitulée " Semaine de la Pêche et de l'Aquaculture Responsables". C'est avec beaucoup d'enthousiasme que nous intervenons auprès des élèves du CAP Maritime du lycée professionnel Léon de Lépervanche du Port pour lancer cette campagne. Nous prenons part à une matinée d’échanges autour de la pêche durable organisée par l’armement SAPMER. Nous présentons les enjeux de la pêche durable, le rôle du MSC ainsi que les pêcheries certifiées australes réunionnaises et leurs bonnes pratiques. Les élèves ont un avant-goût direct du métier avec l’intervention dynamique d’un lieutenant d’un palangrier à la légine. Notre animation en réalité virtuelle permettant d’embarquer sur un navire rencontre un franc succès auprès des élèves ! La matinée s’achève avec une dégustation des produits de la mer pêchés par les navires SAPMER et certifiés MSC. Une belle occasion pour sensibiliser les jeunes générations ! Merci à la SAPMER pour cette belle organisation !
Matinée d’échanges avec des lycéens autour de la pêche durable
De l’importance de la science pour la pêche durable
La collaboration avec les scientifiques est inhérente à la notion de pêche durable : pêcheurs et scientifiques travaillent main dans la main pour gérer durablement les ressources. De nombreux projets avec les scientifiques sont en cours au sein des pêcheries certifiées. Tour d'horizon des sujets passionnants que nous avons évoqués avec eux !
Suivi du stock d’espadon et engins de pêche intelligents avec l'IFREMER
Nous visitons la station de l’IFREMER accompagnées du chercheur en charge du suivi de la population d’espadon de l’océan Indien. Des études génétiques utilisant les relations de parenté entre les poissons sont en cours pour estimer la biomasse du stock.
Au cours de la visite, nous avons même la surprise de rencontrer le scientifique Ifremer référent du thon rouge, basé à Sète, qui travaille sur la réplication du projet SMARTSNAP (mené au sein de la pêcherie de thon rouge en Méditerranée certifiée) au sein de la pêcherie réunionnaise. Ce projet vise à tester des dispositifs de palangre intelligente permettant de détecter les espèces accessoires capturées.
Observateurs embarqués et améliorations d'engins de pêche avec le CITEB
Nous continuons nos visites avec le CITEB (Centre technique de recherche et de valorisation des milieux aquatiques) en compagnie du scientifique référent pour la pêcherie d’espadon certifiée. Ce dernier nous présente les nombreux projets en cours : les essais de palangre verticale, et les turluttes (photo) - des leurres pour calamars actuellement testés pour les palangriers. Le CITEB est également en charge du programme d’observateurs, pour le compte de l’IRD (Institut de Recherche pour le Développement). Notre scientifique forme les observateurs avant qu’ils n'embarquent sur les navires. Il évoque notamment la difficulté à différencier les juvéniles de thon obèse et thon albacore, ce qui conduit parfois à des erreurs de déclaration des captures. Après quelques explications, nous passons un test d’identification de thons : pas si simple !
CITEB (Centre technique de recherche et de valorisation des milieux aquatiques) |
Turlutte - un leurre pour calamar actuellement testé pour les palangriers |
Collaboration avec Kelonia, le centre de soin des tortues marines
Direction Saint Leu, où nous avons rendez-vous à Kelonia, le centre de recherche et de sauvetage des tortues marines. Le directeur nous présente les tortues qui sont accueillies dans le cadre du partenariat entre le centre et la pêcherie d’espadon certifiée.
Lorsque les pêcheurs récupèrent des tortues sur leurs lignes et qu'elles ont besoin de soins, ils les ramènent au centre pour les faire soigner. Il faut savoir qu’à bord, un protocole est mis en place pour que les pêcheurs soient autorisés à remonter les tortues sans dommage. Une fois soignées, les tortues sont ensuite marquées et relâchées.
Nous poursuivons notre visite au musée jouxtant le site. C’est avec consternation que nous découvrons les contenus stomacaux des tortues récupérées : du plastique, et encore du plastique, en nette augmentation ces dernières années.
Kelonia, centre de recherche et de sauvetage des tortues marines
Le rôle des institutions dans la gestion des pêches
Les pêcheries travaillent étroitement avec les autorités de gestion des pêches, sur des sujets comme le contrôle la réglementation ou bien encore la sécurité des navires.
La Direction de la Mer Sud Océan Indien
Notre rendez-vous avec la Direction de la Mer Sud Océan Indien (DMSOI) nous permet de mieux appréhender ses missions, notamment dans l’organisation des contrôles des pêches. Lors de notre visite, nous expliquons le processus de certification MSC et en profitons pour remercier la DMSOI de sa collaboration lors de l’évaluation de notre pêcherie d’espadon. L’organisme de certification a été amené à les solliciter sur les questions de contrôle et d’infractions.
Nous évoquons également les activités du patrouilleur hauturier l’Osiris II, qui rentre tout juste de sa cinquième mission de surveillance de la pêche illégale dans l'océan Indien.
La Direction des Pêches et des questions Maritimes des Terres Australes et Antarctiques Françaises (TAAF)
Rendez-vous à Saint Pierre avec le Directeur des Pêches et des questions maritimes des TAAF et son équipe : l’occasion d’évoquer les pêcheries de langouste australe et de légine certifiées, ainsi que le rôle de l’administration des TAAF dans la réglementation, la surveillance et le contrôle de ces pêcheries.
Nous discutons des prochaines échéances : l’entrée en réévaluation de la légine - le certificat expirant l’année prochaine - les modifications du référentiel, et enfin de l’implication des TAAF dans le processus MSC.
Notre voyage touche à sa fin. Nous tenons à remercier vivement tous ceux qui nous ont accueillies pendant notre séjour. Nous sommes ravies d'avoir pu échanger avec un panel aussi large d'acteurs réunionnais engagés dans la pêche durable !
Caroline Gamblin et Marie Lecomte